Aganta Kaïros à Châteauvallon

Mardi 4 avril, les élèves de 2D13 de M. Estrade, engagés dans le Prix de la Pièce de Théâtre Contemporain pour le Jeune Public, se sont rendus au CNCDC Châteauvallon pour assister à la représentation scolaire de la forme courte du spectacle Aganta Kaïros.

Neutrino_stream.jpg

Source de l'image : http://catalystyogi.com/about-catalyst-yogi/faq/what-is-the-neutrino-stream/

Un spectacle étonnant...

Ce spectacle pluridisciplinaire est né de la rencontre de Laurent Mulot, artiste plasticien passionné de voyages et d'explorations, avec Thierry Poquet, metteur en scène de talent. Cette création est liée au projet scientifique Antarès, Antarès étant un télescope géant installé au fond de la Méditerranée, qui permet de voir les neutrinos, particules microscopiques qui traversent la matière, et voyagent à travers le cosmos, la Terre, les êtres...

 

Le spectacle Aganta Kaïros (Aganta : saisir / Kaïros : la chance) est défini par le programme du CNCDC comme un "voyage théâtral, scientifique et poétique au cœur des expérimentations de la physique des particules élémentaires avec pour guides les neutrinos, voyageurs au long cours de l'univers".

 

Sur scène, deux comédiens, Jacques Bonnaffé et Didier Galas, deux chaises longues, une sphère transparente représentant la planète Terre, des faisceaux lumineux figurant la trajectoire des neutrinos, et un écran sur lequel défilent des vidéos de personnes interrogées aux quatre coins de la planète, sur leurs ressentis face aux questions que soulèvent ces particules invisibles. Mythe et réalité se mêlent, croyances, poésie, points de vue scientifiques... s'entrechoquent pour le plus grand bonheur des spectateurs.

 

... suivi d'une rencontre passionnante

Après le spectacle, les élèves ont eu la chance de pouvoir échanger avec Thierry Poquet, Laurent Mulot et Pascal Coyle, un physicien des particules.

 

Laurent Mulot est à l'origine de ce projet, qui prend sa source dans ses voyages, et dans la mise en place de l'exposition Aganta Kairos, réalisée en collaboration avec l'astrophysicien Thierry Stolarczyk.

Il explique que le spectacle a deux formes, une longue et une courte, et que les élèves viennent d'assister à cette dernière, qui reprend les deux premières parties de la forme longue.

 

Le projet Antarès est évoqué par les intervenants, qui précisent pourquoi le télescope a été installé ici (transparence et profondeur de l'eau, compétences techniques des scientifiques de la Région...) et reviennent sur la définition des neutrinos. Les élèves découvrent qu'en une seconde, 65 millions de neutrinos traversent l'ongle de leur pouce, ce qui permet de mesurer l'étendue du phénomène ! Les neutrinos étaient méconnus il y a encore une cinquantaine d'années. Aujourd'hui on essaie de connaître leurs propriétés, comprendre comment ils se propagent, d'où ils viennent...

Laurent Mulot s'intéresse aux neutrinos car ce sont des messagers. Le neutrino n'est ni dévié ni absorbé, il nous arrive directement, en ligne droite.

 

Le télescope Antarès et le dôme KM3NeT (source de l'image : https://en.wikipedia.org/wiki/File:KM3NeT_DOM_in_Antares.jpg)

 

Les intervenants reviennent sur certains aspects du spectacle : la thématique de l’œil, très présente, symbole de l’œil du télescope Antarès, et la bande-son du début, remise du Prix Nobel de physique de 2015, pour la découverte de la masse du neutrino.

 

Les élèves sont ensuite invités à poser des questions au metteur en scène, au plasticien ou au physicien présents sur la scène du Baou.

La première, "Qu'est-ce qui vous a intéressé là-dedans ?", est renvoyée au public par Laurent Mulot, qui interpelle les élèves sur ce que leur fait l'idée d'être en permanence traversé par des particules, sur ce qu'évoque pour eux ce lien avec le "super-lointain"...

Ce qui intéresse l'artiste, c'est ce lien existant entre nous et l'infiniment lointain, le fait de savoir qu'une particule peut faire le lien entre nous et les astres...

 

Thierry Poquet explique que ce qui les intéresse, c'est la question "en quoi ça nous concerne ?". Il revient sur la démarche de Laurent, qui est allé voir des gens dans tous les pays (pays méditerranéens, Antarctique, Groenland, Madagascar, Nouvelle-Zélande...) et a mis en perspective toutes les informations recueillies avec sa propre culture et son rapport au mystère. Il trouve passionnant d'avoir fait un spectacle ontologique à partir d'un sujet scientifique.

 

Laurent Mulot demande aux élèves s'ils se demandent parfois qu'elle est leur place dans le cosmos, et fait remarquer que la science et la mythologie interrogent toutes deux ces phénomènes. Il souligne le fait que les mythologies ne mettent pas l'homme au centre du cosmos, et que la matière qui forme les étoiles est la même que celle dont nous sommes constitués. Pour lui le neutrino est un messager, qui peut nous donner des informations sur la matière...

 

Pascal Coyle travaille au centre de physique des particules de Marseille. Les élèves lui demandent comment on fait pour savoir où un neutrino entre dans la planète. Le physicien explique qu'un neutrino détecté par Antarès est "tracé", qu'on peut construire sa trajectoire par trigonométrie, puisque sa propagation s'effectue en ligne droite.

 

Laurent Mulot conclut avec une explication du nom du spectacle : Aganta, en provençal, signifie "saisir, attraper, pêcher", et Kaïros fait référence d'une part à la chance, d'autre part à une brèche qui s'ouvre dans la chronologie temporelle...

Le chamane, le scientifique, le philosophe, l'artiste... interrogent tous nos rapports à l'espace et au temps.